En parfait éducateur, Théophile Gautier n'encouragea jamais ses filles à paresser, mais les poussa au contraire à s'occuper: sous cette férule, Judith se livra donc simultanément à l'écriture, la peinture, la sculpture, la musique et l'apprentissage du chinois. Elle publia plus d'une quinzaine de livres, très divers sur le plan du genre, mais traitant presque tous d'un thème oriental. Le thème était alors très en vogue et Judith en tira beaucoup de prestige en son heure.

L'ouvrage qui nous intéresse ici place son sujet au Japon. D'abord publié en 1875, l'Usurpateur est couronné par l'Académie française. Le livre connaît un très vif succès et est réédité en 1887 sous un nouveau titre, la Soeur du soleil. Basée dans le Japon médiéval, l'intrigue se noue autour d'un amour interdit, né entre la femme du Mikado (l'Empereur suprême) et le prince de Nagato. Or, on ne peut impunément attenter à cet authentique dieu vivant qu'est le Mikado: «écrasé par sa propre majesté, aveuglé par sa splendeur surhumaine, absorbé dans le sentiment de sa propre sublimité».