Depuis le XIX^e siècle, la Bible fait l'objet d'un conflit d'interprétation qui oppose exégèse critique et interprétation dogmatique des Ecritures. Les progrès de l'exégèse dans les milieux confessionnels ont certainement contribué à atténuer ce conflit, mais pour comprendre comment la Bible opère sa fonction révélatrice de Parole de Dieu, il faut changer les termes du débat.

Ainsi, on peut considérer les Ecritures qui forment le corpus biblique comme vivantes, à la manière d'un poisson dans l'eau. Leur milieu de vie est nécessaire pour qu'elles soient entendues et crues. La métaphore appelle une réflexion sur leur site, le lieu où elles parlent. Il s'agit de cet espace propre dans lequel s'opère leur communication : la liturgie, la lectio divina, l'accompagnement spirituel et l'exégèse.

Cette restitution de la Bible dans ses sites de lecture interroge de façon renouvelée le rapport entre l'herméneutique de la Parole et l'exégèse des Ecritures ; elle permet de comprendre que le Nouveau Testament est autre chose qu'un recueil où seraient compilées les paroles de Jésus.

Et ainsi l'assemblée chrétienne, loin de ne faire que rappeler des mots d'autrefois, des mots morts et sans histoire, prétend faire une anamnèse de la Parole de Jésus, une parole au présent, une «parole adressée». Il devient alors possible de dépasser l'opposition formelle entre exégèse et théologie et d'ouvrir une voie plus féconde.