Au milieu des années cinquante, nombreux sont les écrivains de la Beat Generation à s'intéresser au bouddhisme et à se tourner vers le haïku, dont la forme épurée fait écho à leur quête de spiritualité. Si Jack Kerouac n'est pas le premier à expérimenter cette tradition poétique, il est selon Allen Ginsberg « le seul maître du haïku ». Adaptant ces poèmes japonais de trois vers à la langue et à la culture américaines, il en vient à redéfinir le genre, qui l'accompagnera toute sa vie.
Au beau milieu de la frénésie des années cinquante, Jack Kerouac, à l'instar de beaucoup d'écrivains américains des générations précédentes, choisit l'errance, solution idéale pour un écrivain qui voulait retrouver l'Amérique mythique et l'homme dans sa pureté originelle. C'est dans l'étude du bouddhisme que naîtra son engouement pour la forme poétique épurée du haïku. Comme la graine qui contient l'arbre en germe, ces courts poèmes de trois vers seront autant de moments d'épiphanie ponctuant la difficile voie vers la sagesse. Kerouac apprend en pratiquant le haïku que la nature, bien que précaire et éphémère, n'en est pas moins principe de changement et de diversité. Tout naît, puis tout meurt pour renaître à nouveau. La souffrance et la mort sont là simplement, intrinsèquement, inscrites dans la vie même. À travers l'expérience spirituelle du haïku, Kerouac les dédramatise, les voit comme elles sont, loin de toute considération affective et intellectuelle, loin de tout dualisme.